De Holly Black et Tony DiTerlizzi.
Comprends:
Le Livre magique, 2003
La Lunette de Pierre, 2003
Le Secret de Lucinda, 2003
L’Arbre de fer, 2004
La Colère de Mulgarath, 2004
Il n’est pas évident de rédiger un avis argumenté sur un livre pour enfant. Ayant découvert celui-ci par le biais de son adaptation cinématographique, il y a quelques années, c’est avec curiosité que je me suis lancé dans sa lecture. La qualité de l’édition de Pocket Jeunesse est la première chose qui frappe : on a entre les mains un vrai livre et non un ersatz. Le grammage du papier, la police de caractère, la texture de la couverture ; tout cela rappelle à l’enfant que c’est un véritable livre qu’il découvre. Qui lui est adressé. Le public enfantin est en effet compliqué à circonscrire : l’on est rapidement trop simple(-iste) ou trop adulte. Personnellement, je ne supporte pas la littérature dite « adolescente ». Autant j’admets que le conte, la fable, l’allégorie est un support parfait pour attiser l’intérêt des plus jeunes, autant je trouve que la littérature « adolescente » est une insulte faite à leur intelligence.
Nous ne sommes pas, ici, dans pareil cas de figure. Les « Chroniques », pour aussi manichéennes qu’elles puissent être, emportent facilement le lecteur dans son univers particulier. Et c’est clairement un livre pour enfant. Glissement assez traditionnel d’un monde normal vers un monde extraordinaire peuplé de fées, de trolls, de nains, d’elfes et de gobelins, les « Chroniques » ont tous les ingrédients pour faire un bon conte de fée. Et c’est exactement ce qu’elles sont : un conte de fée moderne. Les enfants sont déracinés, quittant une grande ville pour l’orée d’un bois, leurs parents sont absents, ils doivent se débrouiller seuls. Et le vieux manoir, héritage de famille, dans lequel ils emménagent regorgent de secrets. Ajouter à cela l’intrusion d’une bonne partie de l’imaginaire anglo-saxon et vous obtenez un parfait cocktail d’aventures extravagantes.
Alors, bien sûr, le(s) livre(s) souffre(nt) d’un défaut classique de la littérature enfantine : les personnes sont finalement très lisses et ne sont souvent caractérisés que par un ou deux traits de caractères forts. Seul le personnage principal, l’un des deux frères jumeaux de l’histoire, est un peu plus développé et dois faire face à des dilemmes contradictoire qui le force à se positionner. Mais après tout, n’est-ce pas là la recette même du conte ? Que sait-on du chaperon rouge ? Du petit poucet ? De Hansel et Gretel ? Il faut simplement un ou deux personnages forts, où l’identification peut se faire très vite chez le jeune lecteur dans un univers suffisamment manichéen pour que les repères moraux soient facilement identifiables – NB : en écrivant ces lignes, je me rends compte que la recette s’applique à 90% de la littérature de big-selling fantasy façon Shannara, par ailleurs…
Mais là où les « Chroniques » brillent comparativement à d’autres écrits du même style, c’est dans le fait qu’elles ne ménagent pas son lectorat. Comme dans les contes classiques, à nouveau, la mort et la menace sont bien présentes et concrètes au fil des pages. Le récit n’est pas édulcoré. L’happy-ending, qui finit bien sûr par arriver, n’est pas forcément aussi unidimensionnelle que l’on aurait pu s’y attendre. Comme dans tous les bons livres, l’aventure ne résous finalement pas tous les problèmes que peuvent rencontrer les personnages, mais leur permet simplement de grandir.
En résumé, si vous avez des enfants de 7-10 ans, n’hésitez vraiment pas à leur faire un petit plaisir de lecture en investissant dans ce bel objet qu’est l’édition intégrale des Chroniques de Spiderwick. Au-delà de cet âge, le divertissement reste efficace, mais perd évidemment de son charme de par la simplicité de sa trame et la familiarité de l’univers qu’il propose. Quoi qu’il en soit, les livres sont clairement mieux que l’adaptation cinématographique de 2008, signée Mark Waters. Plus spectaculaire, elle n’en reste pas moins simpliste par rapport au livre, puisque certains passages sont édulcorés et d’autres carrément supprimés (le quatrième tome, l’Arbre de Fer, est par exemple purement et simplement ignoré).