De J.K. Rowling, 2016.
[Le confinement que nous impose cette vilaine petite bête qu’est COVID-19 permettra au moins une chose : je peux rattraper un peu de retard dans ma PAL. Enfin, seulement maintenant, car professionnellement, ce n’était (et n’est toujours) pas simple à gérer… Soyez prudents ! Restez chez vous ! Mais soit, passons à l’article.]
Ce n’est pas tous les jours que je lis un scénario de film. Ce n’est d’ailleurs pas tous les jours qu’un scénario de film est édité dans le commerce dans une édition à gros tirage (d’abord en hardback chez Little Brown, puis en paperback – version ici commentée). Bon, évidemment, ce n’est pas non plus tous les jours qu’un scénario est directement écrit par l’un des romanciers vivants les plus lus au monde. Et dans l’univers étendu de l’une des franchises littéraire et cinématographique les plus célèbres et les plus appréciées de ces 25 dernières années. J.K. Rowling, la créatrice d’Harry Potter et du Wizarding World (faudrait que j’ajoute le logo du copyright, mais j’ai la flemme de le chercher…) livre ici son premier scénario original.
La parenthèse précédente vous aura sans doute mis la puce à l’oreille sur tout le bien que je pense de l’entreprise (l’empire ?) commerciale que Rowling bâti sur son succès initial. Bien sûr, elle aurait bien tort de ne pas le faire, sachant que la notion même du trans-média ou du multiplateforme est la clé des grandes réussites culturelles depuis Star Wars. Mais je ne peux m’empêcher de voir un peu de cynisme économique dans la publication des scénarios de la franchise Fantastic Beasts. Si l’objet en lui-même est très beau et si l’édition bénéficie d’un véritable travail de mise en valeur, avec un design et des illustrations qui s’intègrent parfaitement au récit, cela reste un simple script.
Cela n’empêche que quelques années après sa sortie, j’ai donc craqué et acheter le premier tome (et le second) à l’aéroport il y a quelques semaines de cela (quand nous pouvions encore voyager). J’espérais alors mieux comprendre les films de David Yates qui, bien qu’étant des réussites formelles, m’avaient sembler un poil brouillon. Et mon espoir est déçu. Le script est effectivement ce qu’il est : un script. C’est donc littéralement le texte du film (pas de scènes coupées, visiblement) avec un court descriptif des passages sans dialogue. Donc le livre est en fait moins que le film et non plus. Vous allez me dire : j’aurais dû m’en douter. Vous n’avez pas tort, mais on ne se refait pas.
Bref, le film nous livre donc l’histoire de Newt Scamander, le zoologue du monde magique, qui débarque un peu par hasard à New York et se retrouve embarqué dans une histoire abracadabrantesque (oui, oui, le choix de l’épithète est assumé !) de … De quoi, au juste ? De péripéties en cascade ? De maltraitance d’enfants ? De complot contre le monde magique tel qu’il est établi ? En fait, tout ça à la fois. Ce qui donne l’aspect fort brouillon de l’ensemble. On suit donc Newt et quelques personnages secondaires finalement peu développé de saynète en saynète, sans véritable fil narratif autre que l' »émerveillement » constant de l’expression faciale d’Eddie Redmayne qu’on ne peut s’empêcher d’avoir dans un coin de sa tête à la lecture du bouquin.
La conclusion de tout cela est que ce Fantastic Beasts and Where to Find Them – The Original Screenplay est finalement un objet totalement accessoire. Il n’apporte rien au film, rien au Wizarding World et rien au crédit de son auteur, J.K. Rowling. Scénariste de cinéma est un métier. Certains savent créer des « original screenplay« , comme c’est le cas ici, d’autres sont fort pour créer des « adapted screenplay« , comme ce fut le cas pour la série de films originaux. Malheureusement, Rowling n’est pas un scénariste émérite. Si elle a toujours un don pour les dialogues, ses histoires souffrent énormément d’un carcan limité comme l’est le script cinématographique. Elle sait créer des scènes spectaculaires, mais elle a besoin de rédiger du contexte, d’approfondir ses personnages, leurs relations et leurs backgrounds pour donner un véritable souffle à ses histoires. J.K. Rowling est une romancière, pas une scénariste. Et ça se voit, malheureusement, de manière très claire à la lecture de ce livre. Il manque de profondeur, de contenu, de lien. C’est une très belle coquille vide. Dommage pour l’univers étendu.