De Julius Onah, 2018.
Voici une nouvelle preuve que Netflix fait du cinéma de seconde zone et devrait se limiter à produire des séries inspirées (rares, dans leur catalogue, mais il faut quand même leur reconnaître cela). The Cloverfield Paradox, sorti il y a déjà deux ans sur la plateforme de streaming, est la seconde suite de Cloverfield, ce found-footage de SF nerveux et original qui laissait New-York en proie aux monstres géants tout droit sortis de l’univers lovecraftien sorti en 2008. Après une incartade intimiste sous forme de huis-clos avec 10 Cloverfield Lane (que je n’ai pas vu), dont j’ai quand même entendu pas mal de bien, c’était donc avec une certaine curiosité que je lançais The Cloverfield Paradox sur mon petit écran (en comparaison avec celui du cinéma, hein !).
Je pensais découvrir une bonne série B de SF dans la grande lignée de Event Horizon, Sphere et autres thrillers de l’espace. Et… c’est exactement ce qu’on m’a servi. Mais sans une once d’originalité ou de peps. En résumé, on suit la vie d’une bande de scientifiques (quelques américains, une chinoise, un allemand, un russe : les équipes spatiales me font toujours penser aux publicités pour Benetton des années 90…) en orbite autour de la Terre alors qu’ils tentent de faire marcher leur accélérateur de particule pour obtenir le secret de l’énergie éternelle. La Terre connait en effet une crise majeure d’énergie qui la fait glisser doucement mais surement dans le chaos global et la guerre généralisée du pétrole et du gaz.
Pourquoi pas, on a connu plus capillotracté pour lancer un film de « space-exploitation » (oui, j’invente les genres, un problème ?) Bon, outre le fait que quelqu’un aurait dû leur dire que l’énergie obéit à au moins une constante, à savoir qu’elle ne peut être créer à partir de rien, le scénar tient la route pendant le premier quart d’heure. Puis, pas de bol, on nous ressort encore une fois le coup de « attention, si vous faites n’importe quoi avec votre expérience, vous allez ouvrir une porte vers d’autres dimensions… et peut-être même l’enfer ! ». Mouais mouais mouais. Je ne sais pas moi… Doom ? Half-Life ? Event Horizon (encore) ? Bref, l’argument du développement scénaristique est tellement éculé que j’ai ris jaune en l’entendant.
Mais bon, le scénar d’Underwater était pas foncièrement original et ça ne m’a pas empêché d’apprécier le film, donc quoi ? Et bien c’est simple. Sur une base donc très très connue, The Cloverfield Paradox se paye le luxe d’enchaîner les facilités sans pour autant récompenser son spectateur avec le minimum syndical que l’on est en droit d’attendre d’un film de genre de ce type. Je développe. Non seulement la protagoniste principale a un background forcément larmoyant, mais le film exploite tous les clichés « nationaux » façon film d’action des années 80 : le russe devient forcément méchant, l’allemand est double, la chinoise (pauvre Zhang Ziyi ! Ils sont loin Tigre & Dragon et 2046 !) est une scientifique qui n’a pas de sentiments, etc. Et le film se paie le luxe d’être très bavard, explicitant à l’envie son scénar avec des dialogues aussi redondants qu’insipides.
Mais le pire, et c’est sans doute un crime de lèse-majesté dans un film de ce genre, The Cloverfield Paradox réussi l’exploit de ne jamais faire frémir. Les personnages sont à tel point prévisibles que les rares scènes d’action tombent à plat. Le nigérian Julius Onah fait ce qu’il peut pour donner du rythme à son film. Mais ça ne marche pas. On n’y croit pas au début, on n’y croit encore moins au milieu et on approche le zéro absolu à la conclusion. C’est dommage de voir que le casting, plutôt bon dans l’ensemble, essaie de faire vivre un scénario indigent qui hésite entre de multiples sous-intrigues qui ne font que nous éloigner du vrai propos du film. On s’en fout de savoir que le gentil copain de l’héroïne sauve une fille sur Terre ! On s’en tape que la scientifique récupérée du monde parallèle veut dégager l’allemande pour récupérer la technologie pour sa réalité à elle ! On veut juste voir les conséquences concrètes de mélanger deux univers parallèles ensemble et, si possible, avoir un monstre ou deux puisque c’est ce que nous promet le film (et la franchise).
Pas de bol, il faudra attendre les dernières secondes à l’écran pour voir apparaitre un bout de tentacule. Trop tard, beaucoup trop tard. Cloverfield est donc une franchise qui meurt doucement dans son coin dans l’indifférence générale. Dommage. Netflix, qui avait sans doute pour ambition de faire un succès critique/commercial avec ce nom connu, a produit un film de série B qui a pour défaut de se prendre beaucoup trop au sérieux et qui n’a définitivement pas les moyens de ses ambitions. Ce n’est même pas un nanard, car on aime regarder les nanards avec un sourire béat aux lèvres : c’est juste un film raté. Passez votre chemin, il n’y a rien à voir.